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DÉCLATION DE YACEF SAADI
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Recueilli par PA Barisain


Liberté Algérie Actualité
(Edition du 7/11/2002)

PARTIE V

En réplique aux propos de Ben Bella
Le revenant
Par Yacef Saâdi (*)

Yacef Saâdi

Après la déclaration délibérément amplifiée par le truchement d'une télévision étrangère par laquelle M. Ahmed Ben Bella avait déclaré en substance que Abane Ramdane était “un traître et le Congrès de La Soummam une trahison”, j'avoue que j'ai d'abord pris la décision de ne pas m'en mêler.

Puis, ayant pris le temps de réfléchir et vu le silence glacial adopté en guise de réponse par des institutions comme l'ONM, j'ai finalement décidé de m'y mettre à mon tour.

Pourquoi ?

Pour la simple raison qu'ayant côtoyé ces deux hommes, j'ai cru, je crois encore, que je pouvais prétendre à quelque légitimité pour pouvoir en parler.

J'ai connu Abane Ramdane pendant les durs moments de la Bataille d'Alger et même avant puisque c'est moi qui, le 7 mars I955, étais allé l'accueillir chez un marchand de lait de la Haute-Casbah pour le conduire au cœur de la “Vieille ville” où il devait rencontrer Krim Belkacem et Amar Ouamrane.

Brisant le carcan de la “liberté surveillée” à laquelle on avait conditionné sa libération de la prison d'Albi en France et dont il devait observer le fastidieux et humiliant rituel d'aller se présenter tous les jours à la gendarmerie de l'ex-Fort National, prenant sur lui, Abane décide un jour de s'éloigner de cette contrainte et de l'inactivité politique pour laquelle il avait été placé en résidence surveillée en Kabylie.

Dans ces circonstances- là, il va de soi que son arrivée à Alger faisait fatalement de lui, côté français, un évadé à part entière et, côté algérien, quelqu'un qui, en toute conscience, entrait dans la clandestinité pour s'engager dans une lutte qu'il poursuivra jusqu'à son assassinat au Maroc par ses pairs.

D'un point de vue purement militant, c'est un futur chef de guerre qui optait pour l'action directe pendant que d'autres “responsables” attendaient, sans l'ombre d'une inquiétude, sur les berges étoilées du Nil que tout soit prêt pour venir mettre leur grain de sel dans le dernier combat de Justes contre la France coloniale.

J'ai connu aussi Ahmed Ben Bella dont le nom véritable est Méziani Ahmed et au sujet duquel je ne dévoilerai aucun secret en rappelant qu'il n'a jamais aliéné sa nationalité, marocaine, même au moment des grands choix.

Dire que je l'ai bien connu, serait prétention de ma part. Mais comme j'ai pu l'approcher de très près à diverses reprises et dans différentes circonstances, de même que j'ai pu, sans me forcer, relever chez lui certaines “constantes” dont l'absence totale de scrupules pourrait figurer en tête d'une longue liste de défauts dont l'envie et un quant-à-soi surdimensionné ne sont pas des moindres.

À tous ces titres je pourrai certes dire que je le connais mais l'homme est composé de tellement de facettes que je continue toujours à me poser la même question : qui est-il au juste ? Hier, c'était, à n'en pas douter, un militant du Mouvement national qui avait choisi, dès le principe, le parti de Messali Hadj dont il était resté proche aussi bien par les “idées” que par l'origine tribale, les Derkaouas d'Arzew.

Mais pour aller vite, disons qu'à l'âge où les autorités françaises ont estimé qu'il devait aller combattre pour “l'honneur de la France”, il y est allé sans rechigner. ll fera donc la guerre dans les Tabors marocains où, dit-on, il se distinguera comme sous-officier notamment à Monte-Cassino où il aurait été décoré pour sa bravoure par le général Juin. À partir de là, Meziani Ahmed alias Ben Bella, ne cessera de vouer de l'admiration au général de Gaulle alors “chef de la France libre”.

La guerre terminée, Abane qui avait échappé à la conscription forcée pour aller au front, décuple d'énergie au sein du PPA clandestin, même pendant la période des AML et les débordements qui conduiront ce grand mouvement populaire à faire tellement peur à la France que cette dernière ordonne à un ministre communiste de son gouvernement de reprendre les choses en main en bombardant les localités de Kherrata, Guelma, Souk-El-Tenine, etc.

Le MTLD est mis sur pied en 1947, et deux ans plus tard, Abane Ramdane échappe miraculeusement à la vindicte organisée par les animateurs du “complot berbériste” mais pas aux conséquences du “hold-up” de la poste d'Oran dont Meziani dit Ahmed Ben Bella s’est toujours autoproclamé organisateur en chef alors que l’architecte de l’opération revient en réalité à Amrani Saïd.

Dommage que Bakhti Nemmiche, l’ex-ministre des Anciens Moudjiahidine et néanmoins agent de la poste principale d'Oran en I949 et qui fut la “taupe” qui signala l'existence permanente d'un certain montant dans le coffre-fort de cette institution, dommage qu'il appartienne aujourd'hui à “l'au-delà”, sans quoi il nous aurait révélé qu'au moment où Souidani Boudjemaâ et son groupe de volontaires étaient en train d’opérer, Ahmed Ben Bella faisait tranquillement les cent pas sur le parvis de la Grande-Poste d'Alger pour se dégourdir les jambes.

Les conséquences de cette opération ne tarderont pas. Elles se traduiront immédiatement par des arrestations. Les agents de la DST et les Renseignements généraux quadrilleront alors l'ensemble du territoire algérien, pour aboutir à ce qui deviendra par la suite le démantèlement de l'OS, l'Organisation spéciale du MTLD qui avait été justement créée pour déclencher la guerre de Libération. Des centaines de militants clandestins sont arrêtés, Abane Ramdane compris. Mais aussi Méziani Ahmed Ben Bella qui, lui, contrairement au futur président du CCE (Abane) qui ne sera libéré de prison qu'en janvier 1955, “s'évadera” au début des années 1950 de la prison de Blida pour rejoindre Le Caire.

Troublante évasion ! Chez les anciens on en parle encore. Ben Bella s'évade, qui plus est de la prison de Blida. À l'époque où il était président de la République, un ancien inspecteur principal de la DST (Défense et sécurité du Territoire), Mohand Ousmer le connaît fort bien, n'hésitera pas à répandre des informations sur “l'évasion” de Méziani Ahmed Ben Bella de cette même prison de Blida dont il disait qu’elle avait été plus ou moins arrangée pour permettre à ce dernier d'arriver au Caire et ne pas manquer la grande effervescence populaire qui avait envahi les rues à la faveur de la déposition du roi Farouk par les “officiers libres”.

Mais le plus important dans les propos de l'ancien officier de la DST, c'est la version qu'il donne quand il affirme que parmi les gens qui composaient la délégation extérieure du MTLD à cette époque-là et que Ben Bella avait été retourné par les services spéciaux français souffrant alors d'un manque critique de renseignements sur la nouvelle direction politique de l'Égypte des militaires. Suivez mon regard !

Pendant ce temps, Abane Ramdane purgeait toujours ses cinq années de détention dans différentes prisons françaises.

Le 1er novembre 1954 arrive et l'équipe qui en déclenche le processus est composée de 6 personnes dont une (Mohamed Boudiaf se rendra fin octobre 1954 au Caire pour délivrer la proclamation du 1er Novembre dont le texte intégral sera diffusé par la Radio du Caire la veille du déclenchement. Les Cinq autres membres du Comité révolutionnaire, dont Didouche Mourad, auront à diriger des zones de combat en qualité de chefs politico-militaires. Des zones qui deviendront des wilayas de combat après les décisions prises à ce propos par le Congrès de La Soummam.

Au Caire, Mohamed Boudiaf prendra en charge la direction extérieure du MTLD qu’il transformera sur le champ en mission exclusivement au service du FLN.

Au mois d’octobre 1956 c’est l’effarement; l’avion d’Air Atlas (marocain) transportant les cinq leaders installés dans la capitale égyptienne, dont Ben Bella, Boudiaf et Aït Ahmed, est arraisonné et contraint d’atterrir sur l’aéroport d’Alger.

Étrange, comme j’y pense encore tout en me demandant pourquoi, alors qu’ils étaient armés jusqu’aux dents, aucun d’eux n’a pris son courage à deux mains pour au moins affecter de se défendre les armes à la main. Mains non, pourquoi se montrer plus courageux qu’on ne l’est en réalité puisque de la chair à canon il y en avait partout dans les maquis et dans les grandes villes pour entretenir la guérilla urbaine.

Puis on apprend, non sans consternation, que Abane Ramdane, le grand Abane, le fin stratège politique, venait de mourir “courageusement au combat”, et plus tard qu’il avait été bel et bien assassiné par ses pairs. Pourquoi ?

Là est toute la question. Quand j’apprends qu’il avait été effectivement assassiné, j’en suis complètement remué car ( connaissant Abane, j’étais convaincu qu’il s’était rendu à son rendez-vous fatal sans méfiance). Assassiner pour rien Abane, c’est en tout cas le moins qu’on puisse dire.

Maintenant à ceux, Meziani Ahmed Ben Bella compris, qui s’étaient empressés de donner leur accord pour son élimination de délivrer enfin le véritable motif qui l’a conduit en toute quiétude au Maroc pour se faire assassiner par des agents du MALG, nous dit-on, à Tétouan encore espagnol.

Pourquoi continue-t-on à accuser Abane de trahison alors que son comportement pendant la guerre de Libération nationale a été irréprochable ?

On comprend que Ben Bella n’ait cessé de développer le complexe de l’exclu en se répandant en diatribes humiliantes contre Abane Ramdane qu’il accuse de l’avoir éliminé du Congrès de La Soummam en omettant de l’inviter officiellement.

Cette version des faits n’est non seulement pas objective mais elle est fausse, apocryphe. Pourquoi l’est-elle ? Parce que Larbi Ben M’hidi qui avait fait deux brefs séjours au Caire où il s’était rendu spécialement pour inviter au moins trois des représentants de la Délégation extérieure à venir débattre de l’avenir de l’Algérie au Congrès d’Ifri, Ben Bella compris, déclare exactement le contraire. On a dit plus tard que si Ben Bella s’était abstenu de participer au Congrès, c’est parce qu’il avait peur de perdre à jamais son confort à l’étranger où il pouvait continuer impunément à jouer “l’historique” alors qu’il n’en a jamais été un.

Passons les évènements et venons-en à la grande grève de la faim de 1961 qui avait mobilisé des milliers de prisonniers du FLN incarcérés dans les prisons françaises et au cours de laquelle nous avons eu à déplorer plusieurs morts après plus de 21 jours de grève.

Ce jour-là devait être en principe la fin de cette grève qui avait mis à mal tant de détenus. Eh bien figurez-vous que Ahmed Ben Bella qui ne voulait pas entendre parler de suspension de la grève, se mit paraît-il dans une colère telle que même ses intimes lui déclarèrent ouvertement leur réprobation.

Et que voulait le zaïm ?

Simplement que la grève se poursuive pour lui permettre d’être libéré par les Français afin qu’il puisse être le seul interlocuteur du général de Gaulle en vue de négociations éventuelles.

Cette fois, ni les Français ni les détenus algériens ne l’écoutèrent, De Gaulle moins que tout le reste, dans la mesure où quelques mois auparavant le chef de l’État français avait parlé de “paix des braves” et non de “paix” à négocier avec les “prisonniers de luxe” comme Ben Bella.

Passons sur Tripoli qui fut une des plus grandes mascarades liées à la guerre de Libération nationale. Subjuguant ses collègues au Congrès de l’idée de former un gouvernement, Ben Bella se rend à Tlemcen via le Maroc et entreprend d’éliminer l’un après l’autre les obstacles qui lui obstruaient le chemin du pouvoir. Il réussit.

Mais en même temps, il réussit aussi à pulvériser les liens de solidarité qui avaient été tissés entre les wilayas de combat pendant les 7 années et demie de guerre de libération. Le wilayisme est né grâce à lui. Il faut savoir que pour arriver au compromis qui conduira au mois de septembre 1962 à la fin de la “discorde” des chefs, plus de 7 000 Algériens ont été sacrifiés en moins de trois mois lors des accrochages entre wilayas...

Ben Bella est élu, on s’en souvient, dans des circonstances peu propices à la transparence des urnes. La première décision qu’il prend est celle qui a consisté à ramener en Algérie plus de 250 000 Égyptiens comme coopérants techniques venus pour nous ramener dans le giron du monde arabe, nous qui n’avions fait que notre devoir en nous lançant dans une guerre de libération animée exclusivement par des Algériens.

Parmi les contingents d’Égyptiens venus nous apprendre, très mal, à lire et écrire, il n’y avait pas à l’évidence que des saints. Bien au contraire. Cet étrange épisode aura permis à une pléthore d’agents des services spéciaux égyptiens de venir espionner à leur guise l’Algérie. Ceci d’un côté. De l’autre, parmi les milliers d’Égyptiens, des centaines, voire davantage, de fervents prosélytes sont venus chez nous uniquement pour semer les premières graines de subversion. Pour toutes ces raisons il faut croire que Meziani Ahmed, Ben Bella, n’a rien d’autre dans la tête que de salir la mémoire de Abane Ramdane qui, dans toutes les étapes que connut la guerre de Libération, était aux premières loges. Aujourd’hui, Ben Bella le traite de “traître” alors qu’on sait que la seule raison qui l’anime est celle qui consiste à se dédouaner à peu de frais en chargeant d’opprobre Abane parce qu’il est Kabyle et, au-delà, a été un militant pur et dur qui n’a jamais voulu céder au chantage des faux militants et autres “historiques” de pacotille dont le seul souci consistait à s’éloigner du champ de bataille pour n’habiter que des palaces aux frais de cotisations du peuple algérien.

Avant de conclure ce survol rapide sur la “personnalité” de Ahmed Ben Bella, personnalité complexe dotée de multiples facettes, une question me brûlait les lèvres depuis le début. Je la pose. Si les Ben M’hidi, les Ouamrane, les Krim Belkacem, les Amirouche, enfin, je vise tous les congressistes présents à Ifri le 20 août 1956, avaient été de notre monde aujourd’hui, Ben Bella aurait-il pris ce risque de les traiter en face de traîtres à leur patrie ? Sûrement pas ! Et Ahmed Ben Bella, l’Algérie lui dira, comme ce personnage de “la soif et la faim” : “J’ai du sang dans les veines, les revenants n’en ont pas” (1)

Y. S.

Yacef Saâdi (*)

(1) E. IONESCO Œuvres complètes, Gallimard, Paris).
(*) Ancien responsable de la Zone autonome d’Alger.

---==oOo==---

L'article de Yacef Saadi montre bien ce qu'a fait De Gaulle.

Quant à ce que dit je ne sais plus quelle personnalité FLN, à savoir que A. Ramdane ne pouvait trahir car il aurait donné ses collègues lors du Congrès de la Soummam, ne tient pas.

En effet, les Français étaient au courant, le Président Du Tribunal de Constantine l'a affirmé à mon père. Et le Gouvernement a interdit d'intervenir. 

D'ailleurs, dans son bouquin sur La Guerre d'Algérie,
Montagnon le confirme et dit même que c'est le représentant du Sud qui a donné les renseignements.

Là aussi, pourquoi ne pas les avoir coxés ?

 Monrose

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