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Sakhiet-Sidi­-Youssef
Une preuve de plus

DE GAULLE VOULAIT-IL
UN DIEN BIEN PHU
ALGÉRIEN ?

par Jean JOLLY (Le Crapouillot N° 93, avril 1987, pages 73-74)

« BON Dieu !... Faites taire ces canons et ces mortiers !
Mes hommes sont à bout de nerfs.
»

Accroupi dans sa casemate, le colonel commandant l'unité d'infanterie retranchée en face de Sakhiet-Sidi­-Youssef, non loin de Souk-Ahras, dans l'Est algérien, demande par radio à ses supérieurs hiérarchiques basés à Bône et à Constantine, l'appui de l'aviation.

Tout autour de lui, les obus, tirés par, l'artillerie de l'ALN, l'Armée nationale algérienne, installée en Tunisie, pleuvent avec une intensité sans précédent.

Le colonel n'a pas les moyens de riposter. Ses jeunes recrues, mal aguerries, ne sont équipées que d'armes légères.

« Alertez l'état-major !... Envoyez l'aviation !... Faites quelque chose ! », répète le colonel.

La situation est sérieuse. Dans cette nuit du 9 au 10 mars 1962, le pire peut arriver aux soldats du contingent laissés curieusement sans protection à l'un des points les plus dangereux de la frontière franco-tunisienne.

La situation est d'autant plus sérieuse pour cette unité que l'état-major, exécutant les ordres du gouvernement, a retiré quelques jours plus tôt l'artillerie lourde, les régiments de Légion étrangère et d'infanterie de marine ainsi qu'une demi-brigade de blindés.

Le piège

Ordres bien singuliers, si l'on songe que les services secrets français ont signalé des concentrations inhabituelles de forces adverses en territoire tunisien, juste en face de ce secteur.
« Je vous en prie... Réagissez ! Nous risquons une attaque massive des fells... »

A l'aube du 10 mars, les tirs redoublent de violence, puis c’est le silence. De son poste d'observation, le colonel scrute l'horizon avec ses jumelles. En contrebas, à moins d'un kilomètre, plusieurs brèches ont été ouvertes dans le barrage électrifié qui marque la frontière entre les deux pays. Ce n'est pas une surprise pour lui, après le bombardement intensif de la nuit dernière.

En revanche, ce qu'il voit dans les collines environnantes lui donne des sueurs froides. Des centaines, des milliers de combattants de l'ALN progressent, à découvert, dans sa direction. Ils sont, à vol d'oiseau, à moins de deux kilomètres. Depuis qu'il se trouve en Algérie, il n'en a jamais vu autant à la fois.

Il est trop tard pour changer de position. Sur son flanc droit, l'ALN a disposé dans la nuit des armes lourdes. Sur son flanc gauche, des troncs d'arbres ont été disposés sur la piste, interdisant tout repli.

Le courage de désobéir

Le colonel s'apprête à lancer un appel désespéré quand il entend, au-dessus de sa tête, un ronronnement caractéristique et réconfortant : les T-6 arrivent. Avec retard. Mais ils arrivent. Les T-6, ce sont tout à la fois les avions d'observation et les chasseurs d'attaque au sol. Ce sont eux qui précèdent et protègent les bombardiers B-26.

Pourquoi ce retard ? Les chefs militaires avaient l'ordre de ne pas intervenir. Le gouvernement français, pour amadouer les dirigeants nationalistes algériens, a décrété quelques jours plus tôt un cessez-le-feu unilatéral. Aussi l'ALN, brisée par les opérations de l'ex général Challe, aujourd'hui condamné pour sa participation au putsch du 22 avril 1961, peut-elle agir en toute impunité et tenter quelques actions spectaculaires.

Informé de cela et prudent, le lieutenant-colonel Lisbonis qui dirige la base aérienne 213 de Bône-les-Salines, a longtemps hésité à intervenir. Dans des circonstances autrement complexes - sinon dangereuses - un an plus tôt, au moment du putsch, il était resté fidèle au gouvernement légal. Toutefois, aujourd'hui, sa conscience le tiraille davantage que son respect des consignes. Aussi, dès le lever du jour, a-t-il donné l'ordre aux escadrilles de décoller de la base des Salines.

En quelques heures, la victoire change de camp. Piquant sur les unités de l'ALN qui progressent vers les brèches du barrage, les pilotes des T-6 tirent sans discontinuer avec leurs mitrailleuses, tandis que les pilotes des B-26, franchissant la frontière, vont lâcher leurs bombes sur les positions de l'artillerie adverse.

Plusieurs fois dans la journée, les T-26 et les B-26 passeront à l'attaque, contraignant les combattants de l'ALN à se replier en désordre et réduisant au silence canons et mortiers ennemis.

Les soldats du contingent et la population civile durement éprouvés par les bombardements de l'ALN respirent. Ils sont sauvés.

Un Diên Biên Phû algérien a été évité de justesse. Grâce au lieutenant-colonel Lisbonis.

Celui-ci n'en sera pas récompensé. Au contraire.

Dans la matinée du lundi 12 mars, un « SO-Bretagne » venant de métropole avec des officiers supérieurs et généraux atterrit à la base de Bône-les-Salines. Les passagers de l'appareil militaire se rendent aussitôt dans le bureau du lieutenant-colonel Lisbonis. Non pour le féliciter, mais pour l'interroger.

Dans l'après-midi, la délégation militaire repart pour la métropole à bord du « SO-Bretagne ».

Quant au lieutenant ­colonel Lisbonis, il s'envole pour Paris à bord d'un autre appareil militaire.

Il s'agit d'une mesure disciplinaire. Le gouvernement reproche au lieutenant-colonel d'avoir enfreint les ordres en faisant bombarder les concentrations de forces de l'ALN en territoire tunisien. A un moment où des négociations sont engagées avec les nationalistes algériens, M. Louis Joxe, ministre chargé des Affaires algériennes, discute à Evian avec Krim Belkacem et les représentants du GPRA, le gouvernement provisoire de la République algérienne. Or, le GPRA aurait aimé que ses forces - l'ALN - puissent contrôler ne serait-ce qu'une infime partie du territoire algérien pour négocier en meilleure position.

En outre, un revers militaire français, surtout au prix de la vie de soldats du contingent, aurait eu un double avantage pour les partisans de l'indépendance de l'Algérie : d'une part il aurait provoqué un choc psychologique suffisamment violent pour pousser l'opinion métropolitaine à réclamer la paix à n'importe quel prix, d'autre part il aurait affaibli la position morale d'une armée de métier, sûre d'avoir gagné la guerre et encore peu favorable à De Gaulle, malgré son épuration.

Pour avoir réduit à néant les projets de l'ALN, le lieutenant-colonel Lisbonis aurait pu avoir sa carrière brisée, si un journaliste, René Attard, correspondant de « L'Aurore », à Bône, n'avait pris le risque de faire connaître la vérité.

Le 14 mars, le quotidien parisien titrait en ces termes l'article de son correspondant :

« Le commandant de la base aérienne de Bône-les-Salines, mis aux arrêts pour avoir riposté aux attaques de l'ALN contre le barrage. »

Le jour même, à 17 h 30, René Attard était expulsé par le préfet Jean Dours, futur directeur de la Sûreté nationale.

Quelques minutes plus tôt, il avait rencontré le lieutenant­ colonel Lisbonis... dans le bureau du préfet de Bône. Pour rendre plus vraisemblables leurs démentis catégoriques, les autorités militaires avaient rappelé d'urgence l'officier en Algérie. Il était arrivé dans l'après-midi à bord d'un « SO-­Bretagne », . celui-là même qu'avait utilisé la délégation militaire venue l'interroger deux jours auparavant...


 


 
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